Maître de Conférences, Histoire du Droit, Univ. Nantes (DCS, UMR n°3128) – Univ. Paris 13 - Paris-Nord
Redécouverte du droit romain et transformation des droits vernaculaires (XIIIe-XVe siècles)

attentionNota : ce texte a un caractère provisoire et ne saurait être cité ni reproduit sans l'accord préalable de l'auteur.

Résumé

La redécouverte du droit romain a eu une influence considérable sur les transformations du droit français à la fin du Moyen Âge. Cependant, une fois cette influence constatée, la question se pose de savoir quelles furent les modalités de cette influence, son ampleur et sa portée.

L'enquête sur ce point est cependant trop vaste pour prétendre aboutir à des conclusions définitives. Tout au plus s'efforcera-t-on ici de tracer quelques lignes directrices d'une telle étude. La question soulève en effet des difficultés méthodologiques spécifiques :

En premier lieu l'identification de ce qu'embrassent les notions de « renaissance », de « réminiscence » ou d'« influence ».

En deuxième lieu la diversité des relations qui se nouent à la fin du Moyen Âge entre les sources romaines et les droits vernaculaires.

En troisième et dernier lieu la variété des incidences qu'a pu avoir cette redécouverte du droit romain sur la pratique et la connaissance du droit à la fin du Moyen Âge.

Le premier point permet de dessiner de manière introductive les frontières heureusement imprécises du sujet. Trois points au moins peuvent être relevés :

1°. Les transformations rapides de la connaissance du droit romain et l'hétérogénéité dont il témoigne en lui-même, avec les conséquences que cela peut avoir sur la possibilité de s'en inspirer ;

2°. L'hétérogénéité non moins considérable que recouvre l'expression « droits vernaculaires » ;

3°. La façon dont les expressions suggérées (renaissance, réminiscence, influence) traduisent une perméabilité des ordres juridiques les uns aux autres.

Quant au second point, on doit noter une très grande diversité des relations. Elle tient tout d'abord aux sources vernaculaires qui portent des traces de droit romain : celles-ci témoignent déjà d'une grande variété dans l'utilisation qui en est faite. Elle tient surtout aux traces de droit romain qui peuvent être relevées : traces manifestes ou implicites, simples reprises terminologiques, transposition directe d'une règle romaine ou vague – si tant est qu'on puisse la qualifier – inspiration.

Ceci conduit au dernier point, la question précise des « incidences ». Au fond, la réponse ne peut être précise et rigoureuse et ceci ne tient pas qu'à la diversité des relations observées. Cette diversité souligne à la fois la richesse que recèle le droit romain pour les juristes du Moyen Âge et, dans les relations établies avec le droit vernaculaire, la malléabilité de l'un et l'autre droit. Dès lors se pose la question de savoir ce que l'on peut entendre par « droit », tant du point de vue romain que du point de vue vernaculaire. Là encore, la réponse ne peut être définitive. Eu égard aux utilisations qui en sont faites, le droit romain oscille entre norme et modèle. Deux interprétations sont dès lors possibles : soit il est possible de distinguer ce qui est proprement juridique de ce qui s'en sépare et la variété des utilisations peut être ramenée à une alternative ; soit cette distinction s'avère impossible et cela suppose d'appréhender l'autonomie du juridique. C'est peut-être à cette aune qu'il convient d'évaluer ou de réévaluer la pertinence de l'Antiquité pour les traditions juridiques et politiques médiévales et modernes.