Présentation
La bataille de Pharsale, qui vit l'affrontement entre les troupes de César et celles de Pompée dans la plaine de Thessalie (Grèce) en août 48 av. J-C., constitue un moment clef des guerres civiles romaines. Elle marque en effet la défaite complète et définitive de Pompée, ouvrant la voie au triomphe de César.
La bataille marqua les esprits de manière profonde et durable et fit l'objet de nombreux récits de l'Antiquité – de César à Orose en passant par Plutarque – jusqu'à la Renaissance avec des auteurs tels que Scipione Ammirato da Lecce, Mario Savorgnano ou Andrea palladio. Il ressort toutefois une image assez confuse de ces récits parfois contradictoires et nombre de questions restent ouvertes : où la bataille a-t-elle eu lieu exactement ? Quelles étaient les forces en présence ?
Aux difficultés inhérentes au caractère lacunaire des sources antiques – imprécisions des données littéraires, rareté des documents archéologiques et évolution des paysages –, il faut ajouter les problèmes propres au traitement de l'information dans la littérature postérieure. En fonction de la nature du texte mais également des intentions de l'auteur, les données ont subi des modifications : amalgames, omissions, exagérations, inventions, interprétations hâtives, etc. Dans l'étude de la transmission littéraire du récit de Pharsale à l'époque moderne, cet aspect du problème devra être considéré avec une attention toute particulière. Il s'agira notamment de comprendre pour quelles raisons et de quelles manières les auteurs des époques successives, et notamment de la Renaissance, exploitèrent cette bataille emblématique.
Ce projet Bonus Qualité Recherche poursuit la réflexion autour de ces problématiques, en ajoutant aux approches traditionnelles le potentiel offert par les nouvelles technologies (traitement des données spatiales, modélisation 3D, etc.).
État de l'art
Le premier récit de cet événement décisif de l'histoire de Rome est attribué à César lui-même, auteur probable des Commentaires sur la Guerre civile. Le combat y est rapporté en détail au livre III, au cours des chapitres 85 à 99, où l'auteur décrit notamment les positions géographiques occupées par les forces en présence, ainsi que les stratégies choisies par leurs chefs respectifs. Par la suite, les historiens, de langue grecque comme Appien et Dion Cassius, ou de langue latine comme Tite-Live ou Orose, l'ont également rapporté. Outre les historiens, la bataille de Pharsale est mentionnée par des biographes-moralistes comme Plutarque et Suétone, des auteurs militaires tels que Frontin et Polyen, ou encore des rhéteurs comme Valère Maxime. Ovide y fait également allusion, tandis que Lucain va jusqu'à y consacrer une épopée intitulée De Bello civili sive Pharsalia (La Pharsale ou Guerre civile dans les éditions françaises). Enfin, nous disposons de sources indirectes qui, si elles n'abordent pas directement le déroulement de la bataille, fournissent des informations sur la topographie de la plaine thessalienne et des environs de Pharsale. Parmi ces sources géographiques se distinguent Strabon, Scyllax et Pline l'Ancien.
Dans la production textuelle médiévale, l'écho de la bataille ne disparaît pas, notamment grâce aux Commentaires de César ou la Pharsale de Lucain qui jouit même d'une diffusion manuscrite parmi les plus importantes pour un ouvrage antique. Sous l'impulsion de la redécouverte des Anciens par les Humanistes et du perfectionnement des techniques d'impression, l'histoire des guerres de Rome fait l'objet d'une diffusion sans précédents à la Renaissance. La bataille de Pharsale est ainsi décrite par de nombreux auteurs de l'époque, le plus souvent par le biais de la traduction, du commentaire ou de la citation d'un ouvrage antique. C'est le cas d'Andrea Palladio dans ses Commentari a Giulio Cesare (1575) ou de Nicolas Machiavel (Discorsi sopra la prima Deca di Tito Livio, 1531) ainsi que, parmi les experts militaires, de Domenico Mora (Il soldato, 1570) ou de Mario Savorgnano (Arte militare terrestre e maritima, 1599).
Étant donné son rôle capital dans l'histoire romaine, l'affrontement entre les troupes de César et celles de Pompée a été au cœur de plusieurs études qui concernent notamment la localisation du champ de bataille et qui remontent pour la plupart au début du XXe siècle. Les travaux d'Yves Béquignon – entre 1925 et 1974 – comptent parmi les plus importants. Le chercheur y résume les principales hypothèses émises à ce sujet en tentant de les confronter au terrain actuel. Parallèlement, plusieurs études ont été menées sur les sources littéraires et leur transmission. À titre d'exemple, F. Paschoud a publié un article sur les contradictions des sources antiques, tandis que G. Delvaux, dans une étude à propos de Plutarque, a travaillé sur les sources fragmentaires de la bataille. Notons par ailleurs que la Pharsale de Lucain a fait l'objet travaux particulièrement nombreux.
Pour ce qui est des époques successives, la recherche n'a voué qu'un intérêt marginal à l'affrontement de Pharsale. En effet, si l'art militaire du Moyen Âge et de la Renaissance a souvent été au centre de recherches scientifiques, y compris pour ce qui est de la place occupée par les savoirs hérités des Anciens, le problème de la représentation des batailles antiques ne semble pas avoir été traité dans la perspective de la transmission et de la réception littéraire.
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